Le Rhône, fleuve capricieux, pendant de nombreux siècle indompté, la variabilité saisonnière des débits, l’intensité et la fréquence des crues ont de tous temps rendu relativement difficile la navigation des bateaux, des radeaux et son franchissement par des bacs.
Sur l’ensemble du parcours du Rhône et de ses affluents, pendant des très nombreux siècles, la quasi absence de pont, faisait que les deux seules manières d’aller d’une rive à l’autre étaient soit par une embarcation à rames soit avec un bac à traille. Ces derniers furent nombreux est indispensables à la circulation des hommes, des animaux et des marchandises.
Un bac à Traille de la fin du 19 eme siècle
Les Bacs
L’époque précise à laquelle les bacs sont apparus est inconnue, mais ils ont existé depuis l’Antiquité.
Les bacs étaient des bateaux plats permettant de transporter hommes, bétail et marchandises d’une berge à l’autre du fleuve. Les premières techniques utilisent simplement les rames ou les perches pour diriger l’embarcation.
Le bac était « libre », le passeur devait anticiper sa trajectoire et partir en amont du point de débarquement de manière à utiliser la force du courant et donc à minimiser ses efforts.
La traille pendulaire
Après le bac « libre », un autre système apparut, la « traille pendulaire » elle facilitait le travail du passeur.
Ce système employait le principe de la captation d’énergie. Le bac était retenu par une corde la « traille » ancrée en amont, au milieu du fleuve et soutenue par des flotteurs. Grâce au courant et par l’action du gouvernail, la barque dérive d’un bord à l’autre en dessinant un arc de cercle autour du point d’amarrage.
Il faut préciser que le système était dangereux pour la navigation.
La traille traversière
Une autre technique remplaça la traille pendulaire, la « traversière », elle améliora grandement les allées et venues de part et d’autre des fleuves, deux tours de hauteur suffisante pour laisser passer les bateaux étaient reliées par un câble. Sur ce dernier, un système de poulies permet la fixation et le déplacement du bac. Les traversées devinrent plus sûres et régulières.
A certains endroits, les passages aménagés sur le grand Rhône pour effectuer la traversée, ont nécessité la construction de tours maçonnées de grande hauteur pour maintenir la traille, la distance entre les deux rives pouvait être de plusieurs centaines de mètres. La présence d’arbres pouvant supporter la traille, n’était pas toujours aux bons endroits.
A partir de la pointe nord de la Camargue aussi bien sur le Petit que sur le grand Rhône, ils furent nombreux et souvent payants.
Quelques bacs à traille sur le petit Rhône.
Fourques /Arles
Mas de Portarnaud
Saliers / St Gilles
Albaron / la Motte
Sylvéréal : Mas du Juge : (au sud-est, reste un petit port abrité rive droite. Le fleuve est très rétrécis à cet endroit, il est probable que ce soit l’emplacement de l’ancien bac à traille.
Sur le Grand Rhône à partir d’Arles
Entre Arles et Trinquetaille
Entre le mas de Fort de paques et le Plan du Bourg
Sur le canal des Launes entre Barcarin et le sud du mas du Grand Peloux
Un autre existait avant 1587 sur le bras de l’escale au Plan du Bourg
Bac du Bras de L’Escale au Plan du Bourg avant 1587
Le Canal des Launes
Les portes d’entrées du canal étaient situées au niveau du mas Ponsar en aval du mas de Chamone rive droite à environ 6 km de la tour St Louis.
Aujourd’hui, c’est le bac du canal des Launes qui nous intéresse. Donc, en 1706, les fermiers des Gabelles, désespérant de juguler la contrebande du sel tiré par les faux sauniers dans les nombreux étangs salés qui se trouvaient entre l’entrée du Bras de fer à Chamone et le littoral, avaient adouci l’eau de ces étangs en les faisant communiquer avec le fleuve par un canal dit « canal des Launes ».
« …Il a été ensuite exposé qu’en suite de l’arret du conseil du 24 octobre 1705 ayant été creusé en 1706 un canal pour déssauner les étangs de l’Eyselle ou le sel se formoit naturellement… ».
Justement, ce fameux canal, qui permettait d’amener de l’eau douce dans les étangs inférieurs et qui fut construit à la demande des fermiers généraux engendra de nombreux problèmes. Et c’est à cause dudit canal que le Rhône en 1711 à l’occasion d’une crue, s’engouffra par les portes laissées ouvertes soit disant par un homme chargé de réguler les entrés d’eau dans le canal. C’est depuis cette période que le fleuve chemine vers le sud et ce jusqu’à aujourd’hui. A cause de cet incident, ce sont les riverains du Bras de Fer qui furent peu à peu privé d’eau douce, et le transport du sel de Badon qui devint difficile.
Donc, ce changement de lit du fleuve, modifia la circulation des biens et des personnes .Il fallut absolument que les gens puissent passer d’une rive à l’autre, un bac fut mis en place.
Un document des archives communales d’Arles daté de 1791 nous en parle. Sachant que le canal des Launes était entretenu aux frais de l’état (le Roi), qui décide un beau jour de ne plus y pourvoir. La commune va prendre immédiatement le relais afin de poursuivre ce service public. Il est probable que le bac fut établi dans les années 1720 et a sans doute perduré bien après 1791.
Document original des archives communales d’Arles
Conseil du 2 janvier 1791
Mr le président a ensuite exposé que la ferme générale n’entend plus se charger du payement du batelier placé au canal des Launes, cet établissement utile et meme indispensable pour la communauté de la Camargue au Plan du Bourg doit ètre incessamment ètre entretenu, il faut demander d’y ètre authorisé et de continuer Pierre Japer employé à ce bac depuis plusieurs années.
Sur quoy oui Mr le substitut du procureur de la commune, il acte délibère d’entretenir le bac du Japon au frais de la commune et cependant messieurs les officiers municipaux sont priés et authorisés de poursuivre le payement et l’entretien de ce bac par qui de droit, et en attendant que le meme batelier sera continué.
Ce bac à du être mis en place dans les années 1715/1720, nous voyons qu’il demeure en place en 1791 et a sans doute perduré de nombreuses décennies après.