L’ancienne prise d’eau de la grande Montlong

Avant le Xeme siècle, le manque de documents écrits désole les chercheurs, seules les découvertes archéologiques, lèvent timidement le voile sur une longue période d’histoire. Des roubines ont forcément existées, sans doute depuis la période romaine.

La Camargue au X eme siècle, devait être hostile mais infiniment belle, couverte d’épaisses forets d’essences diverses, ormeaux, pins, frênes, peupliers blancs, tamaris etc.., permettant l’approvisionnement en bois de consommation courante et de construction.
La prolifération d’animaux de toutes tailles devait faciliter la chasse, la pêche dans le Rhône et ses différents bras qui cheminaient à travers la Camargue, devait fournir quantité de poissons.

La mise en culture de la Camargue, a constitué pendant de longs siècles, une tache insurmontable pour les gens soucieux d’obtenir de la nature des denrées destinées à satisfaire leurs besoins basiques. Seuls inconvénients, les fréquents débordements du Rhône et les nombreuses terres inondées en permanence ainsi que l’omniprésence du sel dans les étangs inférieurs.

Le delta naturel était donc tributaire des inondations hivernales d’eau douce et en été pour certains endroits, à un asséchement et une salinisation. Pour pouvoir sédentariser des populations, il était indispensable de se protéger des inondations et de trouver des solutions pour dessaler des milliers d’hectares.
Le creusement des canaux pour le drainage des parties marécageuses et l’extension des levées ont composées jusqu’à la fin de la période médiévale les principaux travaux exécutés en Camargue. Les roubines recevaient les eaux de pluie et les évacuaient principalement, vers l’étang du Vaccarés. Les utilisateurs se rendirent vite compte qu’un entretien pratiquement permanent était nécessaire. Déjà au XVeme siècle, des associations ou confréries s’occupent de la gestion et de l’entretien des roubines et des levées, « les roubiniers » et « les levadiers ».
Peu à peu, au fils des années, les digues s’élèvent, protégeant les parcelles arables. De nombreuses valats (fossés) et roubines continuaient à drainer les parties marécageuses en libérant d’immenses portions du territoire camarguais.
Il fallait ensuite pouvoir arroser les cultures en place, des prises d’eau virent le jour, sur le grand et le petit Rhône. Ces installations fragilisaient les digues, des propriétaires terriens voyaient d’un mauvais œil l’installation de prise d’eau chez un voisin.
Dans les années 2010, les travaux de réfection des digues du Rhône par le Symadrem, en aval de Trinquetaille sur la rive droite, une ancienne prise d’eau a été redécouverte au quartier de Montlong. Elle semble datée du XVIIeme siècle.

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Elle est située à environ 5 km sur la D36 au niveau de l’embranchement de Gageron. Elle est très facile à découvrir, un escalier en bois a été aménager pour accéder au site.
Cet ouvrage est composé pour la partie qui est sur le haut de la digue, d’un petit bâtiment en pierre taillées, recouvert de dalles, avec à l’intérieur la partie mécanique avec son système de vanne coulissante verticale, appelé martellière, composée d’une poutre de bois percée en son milieu ou passe la vis métallique avec son écrou qui permet de manœuvrer l’ensemble avec une clé, elle permettait d’actionner la partie inférieure qui devait être métallique et d’environ 2 m² de surface.

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A quelques mètres en arrière de la bâtisse, un regard en pierre permettait de voir à l’intérieur des deux conduites dont une emmenait l’eau jusque dans le canal de la grande Montlong et irriguait de nombreuses parcelles de terres cultivées, l’autre permettait seulement de vidanger en cas de besoin. Cette explication est celle qui figure sur la table d’interprétation sur le site, l’étroitesse du regard ne permettait pas à mon avis de voir les deux canaux.

 

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Le regard

DSC02172Croquis de la table d’interprétation

Nous voyons sur les photos, que la prise d’eau est légèrement dirigée vers le coté amont afin de faciliter l’entrée des eaux dans la structure. Cette construction est soignée, un parement en pierres taillées, à l’intérieur un remplissage hétéroclite lié au mortier de chaux.
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La partie de l’ouvrage coté Rhône, montre qu’un mur de chaque côté s’avance dans le fleuve. Faisant un bon mètre d’épaisseur par trois mètres de hauteur. Ils sont ouvragés avec des pierres de parement taillées et de bonne facture, sans doute de Beaucaire. Nous pouvons voir ce qui ressemble à deux entrées obstruées avec des pierres taillées. De nombreuses agrafes métalliques lies les pierres entrent elles, preuve que de multiples réparations ont eu lieu à différentes époques.

Grande Montlong

Le cheminement de la grande Montlong en 1837

Cette prise d’eau permettait d’irriguer les cultures sur 3,5 km environ. Elle cheminait au départ du Rhône à proximité du mas de Montlong, ensuite en allant vers le sud elle passait au hameau de Gageron pour se jeter dans les marais de la Grand Mar (en 1837) et actuellement marais de Tour Blanque.
Aujourd’hui, l’eau du Rhône pompée au nord de l’association est déversée dans le canal d’assainissement. Le canal de la Grande Montlong comporte 2 branches, pour un linéaire total de plus de 6 km de canal.

Un grand merci au Symadrem d’avoir mis en valeur cet élément essentiel du patrimoine rhodanien-camarguais.

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